Publications

Rechercher les articles
par mot du titre ou mot-clé :

présentés par :

année et n° (si revue):

auteur :

Promouvoir des communautés : continuons de rêver...

Gabriel Marc
Publié dans Bulletin PAVÉS n°34 (3/2013)

 Sous le titre « Donnons la parole au silence », une modeste initiative bretonne de décembre 2011 avait recueilli 2000 signatures[1]. Dans la foulée des Autrichiens, des Allemands, des Flamands et d’autres Français, on y appelait à « prolonger le grand acte du Concile ». Parmi les signataires, Gabriel Marc énonce pourtant une réticence de fond avec laquelle nos communautés de base seront sans doute bien d’accord. Gabriel Marc est décédé le 20 octobre dernier à 79 ans. On le présente habituellement comme un « chrétien engagé dans la justice sociale ». Économiste, ancien administrateur de l’INSEE, il avait présidé l’ACI française (1971-1977), puis le Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement (1982-1988) et les Commissions Justice et Paix d’Europe. Depuis 1980, il avait constitué une communauté de base qui ne compte plus que quelque huit survivants aujourd’hui. (P.C.)  

J’ai signé cet appel qui en rejoint bien d’autres de même facture. C’est donc que j’en approuve la teneur. Pourtant je ne puis dire que je suis comblé. Il me semble trop court dans son ambition et cela sous deux aspects : il ignore les attentes du monde et il est trop lié à un tissu ecclésial périmé.

La communauté rassemblée s’inquiète à juste titre de la baisse du nombre des prêtres. Elle craint de n’avoir plus toujours et partout la messe. Elle craint même parfois qu’il s'ensuive un délitement de l’Église et un effacement sur la place publique. L’appel épouse ses soucis, mais seulement ses soucis et ses besoins. Il ne se réfère pas à ce que seraient les attentes des femmes et des hommes auxquels elle est envoyée pour annoncer une Bonne Nouvelle. Pourtant l’Esprit-Saint s’exprime aussi par ces attentes!

 

L’appel demande donc davantage de ministres ordonnés : hommes mariés, femmes, étrangers, et récuse implicitement les contre-arguments de la haute hiérarchie. Mais il ne répond pas à la question primordiale : des ministres pour quoi faire ? S’il ne répond pas, c’est qu’il reste prisonnier du tissu ecclésial issu des siècles, qui fut pertinent mais l’est de moins en moins. Pourtant on semble vouloir le revitaliser et occuper coute que coute les postes pastoraux. Le schéma a été longtemps le suivant : une communauté territoriale, un clocher, un prêtre. Or il n’y a plus assez de prêtres et par ailleurs la population devient de plus en plus nomade, elle va et vient. Il y a encore cinquante ans bon nombre de paysans ne s’aventuraient guère hors du canton. Aujourd’hui les gens se déplacent à tout propos pour s’établir ailleurs. Le tissu ecclésial du monde rural ne prend plus sur une population fluide, de culture et d’habitat urbains.

Il y a donc nécessité d’imaginer dès maintenant et d’expérimenter sans tarder un nouveau tissu ecclésial pour notre temps. Selon moi il repose sur de petites unités ecclésiales à taille humaine de nature communautaire.[2]

On parle couramment de communauté paroissiale. C’est souvent par abus car une assemblée dominicale juxtapose des fidèles se dispersant sitôt la messe terminée, ce n’est pas une communauté. Une communauté véritable c’est un regroupement de croyants au Dieu de Jésus-Christ qui pratique réellement les deux commandements que celui-ci a laissés : aimer Dieu, aimer l'autre, c’est tout un.

Concrètement cette cellule – un groupe dans un village ou un quartier, une équipe de mouvement, un groupe de service caritatif, un groupe de catéchistes, un groupe liturgique, une bande de jeunes copains etc. – se retrouve pour prier, pour partager, pour bâtir une fraternité réelle. Bref une communauté qui rayonne et donne envie.

Ce ne peut donc être une communauté fermée, calfeutrée. Comme un neurone cervical elle doit se doter de synapses en direction de la société ambiante, des communautés voisines, de l’évêque, des nouveaux venus à accueillir. Elles seraient reconnues par l’Église diocésaine à partir d’unités pastorales où résiderait un vicaire de l’évêque, qui ne serait plus un curé chef d’entreprise mais avant tout soucieux du lien de communion entre les communautés.

Le signe fort de cette communion serait un rassemblement eucharistique périodique de toutes les communautés au centre du secteur pastoral. Au cours de cette assemblée, à laquelle on consentirait le temps nécessaire, on valoriserait les retrouvailles, la Parole de Dieu, le moment eucharistique et surtout le partage, grand oublié aujourd’hui. A tour de rôle, deux ou trois communautés exprimeraient devant toutes les autres ce qu’elles retirent de leurs rencontres, de leur prière, de leur ouverture sur la société et les feraient ainsi participer à la louange.

Ces petites cellules d’Église éliraient évidemment un animateur, voire des responsables des diverses activités. Les animateurs pourraient être reconnus par une lettre de mission donnée par l’évêque. C'est dans cette expérience vécue que ressortiront peu à peu les ministères nouveaux dont l’Église à venir aura besoin. Dans une étape ultérieure certains pourront être ordonnés.

 

Gabriel Marc

Notes :

[1]   À l’écoute de la Parole. 2000 catholiques élèvent la voix. Avril 2012. Brochure de 55 pages publiée par CELEM – Chrétiens et libres en Morbihan. On peut lire cet appel, par exemple, sur le site de JONAS http://www.groupes-jonas.com/?A-L-ECOUTE-DE-LA-PAROLE-L-APPEL

Contact : michel.bloch-lemoine@sfr.fr

[2]  L’Église est une fraternité. Se connaître, sentir qu’on a le même foyer, participer à une certaine identité de motivation, communiquer, partager : tout cela ne peut se faire au niveau d’une grande masse (d’où la nécessité de petites communautés), disait le P. Congar il y a déjà longtemps.

 


retourner dans l'article


webdesign bien à vous / © pavés. tous droits réservés / contact : info@paves-reseau.be

Chrétiens en Route, Communautés de base, Démocratie dans l'Eglise, Evangile sans frontières, Hors-les-murs HLM, Mouvement Chrétien pour la Paix MCP, Pavés Hainaut Occidental, Sonalux