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Ainsi vont les journées chez une hébergeuse

Gisèle Vandercammen
Publié dans CEM n°122 (3/2019)

Tous les soirs, au parc Maximilien, quelque 700 migrants ou demandeurs d’asile se regroupent autour des ‘white jakets’  qui essayent de leur fournir une place pour passer la nuit au chaud et en sécurité. Certains sont envoyés au centre ‘la porte d’ULYSSE’  mais il n’y a place que pour 300 personnes, alors d’autres lieux d’hébergement s’imposaient dans nos communes bruxelloises. La Plateforme citoyenne a donc encouragé et aidé à l’ouverture d’autres centres d’hébergement comme celui de Woluwe-Saint-Lambert. C’est que le conseil communal de Woluwe-Saint-Lambert, comme beaucoup d’autres en Wallonie et à Bruxelles, a voté la motion « commune hospitalière » : on veut en faire un peu plus ! Il offre ainsi pour quelques mois une maison vide et prend en charge les frais généraux, eau, gaz, électricité, assurance. Carla cite : Anne-Marie, Nicholas, Anne, Ingrid, Pierre, Mohammed, d’autres rassemblent une bonne trentaine de bénévoles – militants de droits humains engagés, ou citoyens solidaires, déjà ‘familles hébergeuses’, installent assez facilement une salle à manger, une cuisine et des chambres pour dix à douze personnes. Ils auraient souhaité plus vaste pour recevoir jusqu’à vingt personnes. Dans l’urgence des rigueurs  hivernales, la commune s’est engagée pour quelques mois mais si la formule fonctionne bien, pourrait envisager de continuer en plus grand.

Les journées de la semaine sont planifiées. Le matin de 8 à 11h,  deux personnes viennent préparer café, thé et pain ; certains réfugiés se préparent eux-mêmes des œufs brouillés avec des oignons, des tomates, des poivrons, ce qu’ils trouvent dans le frigo et qu’ils connaissent. Ils doivent partir avant 11h. Deux ou trois voitures (chauffeurs bénévoles) viennent les chercher pour les amener au parc.

Prolongation pour les bénévoles : remettre la maison en ordre, nettoyage, préparation des lits pour le soir, par roulement emmener les draps à lessiver, préparer chez soi le repas du soir, courir les magasins, obtenir les invendus, surtout du pain, si possible de la viande. Les hébergés aiment les plats saucés dans lesquels tremper le pain, peu les légumes qu’ils ne connaissent pas comme les chicons ou les bettes. Le tout très épicé. Cela ne fait aucun problème à nos volontaires : ‘je connais mes cocos’ nous dit Christine, hébergeuse depuis la première heure.

Il faut  souvent acheter café, thé, pain et œufs ; mais aussi des tickets de métro, des produits d’entretien et d’hygiène. Nos amis raffolent d’eau de Cologne, d’huile pour les cheveux, de crème pour le corps, car leur peau est attaquée et abîmée par le froid.

Le soir, à partir de 20h, au moins deux bénévoles assurent la permanence d’accueil : garder les plats chauds, leur montrer les lits, surtout écouter leurs récits, s’ils ont envie d’en parler. Parfois ils sont tellement fourbus, déçus, en manque de sommeil, qu’ils se précipitent dans les lits sans manger. Ils arrivent dans les trois voitures des volontaires, et parfois, en cas d’absence de l’un ou l’autre chauffeur, on va en chercher en métro. Et le matin suivant ils repartent.

Où repartent-ils ? Ils vont rejoindre la gare du Nord, ils se rencontrent entre eux, se refilent les bons filons, s’informent, s’organisent, arrivent à se soigner aussi (sans doute grâce aux Médecins du Monde). Presque tous les midis, des personnes apportent de la nourriture près de la gare ou du parc Maximilien.

Certains arrivent en Angleterre (mais la vie n’y est pas facile) : avec une bonne adresse, ils peuvent rejoindre des compatriotes, mais pour lesquels ils doivent travailler, sans sécurité ni salaire ; d’autres y demandent l’asile et se retrouvent dans des centres ouverts, d’autres appellent leurs amis restés en Belgique pour dire que tout va bien… Mais au fond, on n’en sait rien.

Les autres, ceux qui n’arrivent pas à passer sont à la limite de leurs forces et l’accueil dans cette petite maison leur est un réconfort ; ils prennent une douche en arrivant, ils s’endorment presque dans leur assiette. Quand ils peuvent revenir plusieurs fois, il devient possible de voir que faire, comme prendre rendez-vous avec un avocat, s’ils le souhaitent. La confiance entre eux et les bénévoles est réciproque

Tout en gérant cette maison, les hébergeurs de la première heure continuent de loger chez eux, surtout le week-end. Il faut vite courir d’un lieu à l’autre. M. est arrivé ‘avec une jambe à moitie tordue’, nécessite une visite chez le docteur, puis repos, l’autre a perdu son sac à dos dans le métro, il faut faire les démarches pour essayer de le récupérer, un autre encore a besoin d’un chargeur du téléphone, tous ont le sentiment que cela ne peut pas continuer ainsi. Le désespoir commence à ronger les migrants mais aussi ‘les familles hébergeuses’ : marre de faire la charité, il faut  faire la justice.  La solution ne peut être que politique… ou ne sera pas.

Notre coordination des Communautés de Base – qui dispose d’une petite réserve sur base des cotisations des communautés et des abonnements à la revue – a décidé de contribuer financièrement à cette initiative. Voici le compte auquel vous aussi pouvez envoyer votre contribution :

BE59 0689 3244 1526 : "Soutien hébergement migrants Woluwe-St-Lambert" 


Gisèle Vandercammen (Communautés de Base)


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