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Adieu à José Lhoir (1931-2019)

Pierre Collet
Publié dans HLM n°159 (3/2020)


Dimanche 8 décembre, notre ami José Lhoir s’est endormi dans la paix du Seigneur et ses funérailles ont été célébrées à Waterloo, sa paroisse natale. Prêtre, théologien sorti de la Grégorienne mais qui ne se prévalait jamais de ses titres, professeur au Grand Séminaire puis curé et doyen, José avait aussi tenu à être professeur dans le secondaire. Mais il était avant tout un ami qui, partout où il passait, marquait la rencontre de son empreinte et savait partager sans compter avec tant de personnes qui faisaient appel à sa grande faculté de patiente écoute. Les gens comptaient infiniment plus pour lui que les choses, et la cure de Nivelles n’a pas eu le droit de gagner en confort pendant son séjour. Un de ses confrères confiait même avoir un peu peur d’y être reçu tant il la trouvait austère : "José, c’est un vrai moine !" Mais son sourire et ses yeux malicieux étaient comme le débordement d’une vie intérieure intense qui cherchait à se transmettre. Heureusement, c’était aussi un homme très équilibré, capable de prendre distance et repos : retrouver ses neveux, voyager, écouter de la musique, planter un arbre, partir à vélo, et surtout lire tout ce qui se publiait de valable concernant la foi et la théologie, autant de bons moments pour retrouver du souffle.

Et puis José, qui avait enseigné la liturgie à Malines, savait célébrer de manière très simple et naturelle : il avait un véritable charisme pour cette fonction, et une très belle voix. Tout le monde s’accordait à trouver ses homélies remarquables, claires et brèves, concentrées sur un sujet précis : on peut encore en retrouver le style et la profondeur dans les trois volumes qu’il a publiés au bénéfice de telle ou telle œuvre locale qui l’avait sollicité. Soucieux de faire évoluer les célébrations vers une plus grande participation, il avait même tenté d’insérer des "temps d’homélie partagée" en petits groupes, mais ce fut un échec : il était sans doute déjà trop tard pour faire évoluer les pratiquants de cette époque vers un tel statut de participants actifs. 

Approchant de ses 60 ans, José a demandé un allègement de charge et a rejoint la communauté des dominicains de Froidmont, comme curé des deux paroisses locales, puis une fois pensionné (à 65 ans comme il se doit…), la communauté des dominicaines de Herne et enfin la communauté des bénédictins de Clerlande, mais sans habiter le monastère cette fois : la vie commune semblait lui aller comme un gant et ce n’est pas sans difficulté qu’il avait dû se résoudre il y a trois ans à quitter ses frères moines pour entrer dans une maison de repos.

Pendant plus de 30 ans, nous nous sommes rencontrés avec José au sein de Hors-les-Murs, et particulièrement dans le sous-groupe Corinthe qui rassemblait tous les deux mois des prêtres célibataires et des familles de prêtres mariés. Pierre de Locht était l’âme pensante de notre groupe et son animateur efficace, et José y était d’une fidélité totale, ne manquant aucune occasion d’écrire ce qu’il retenait de nos échanges : notre bulletin a beaucoup profité de ses articles à cette époque. Il y partageait son idéal de parler vrai, de proclamer ce qu’il croyait vraiment, d’être un croyant parmi d’autres, en marche, jamais arrivé. On comprendra d’emblée que ce n’est pas tant le combat contre la loi du célibat qui motivait sa présence, mais bien davantage la remise à plat du statut du prêtre aujourd’hui, comme le dira bien mieux que moi Jean-François Grégoire dans l’hommage qui suit.

Revenant sur ses années de doyen de Nivelles, j’aimerais rappeler cette histoire dont José était assez fier. Il s’agit de la démarche de quatre doyens du Brabant wallon[1] auprès du cardinal Danneels – vers 1985 sans doute – pour  lui signifier qu’ils disposaient dans leurs paroisses et doyennés d’équipes de laïcs qui étaient prêtes à prendre des responsabilités importantes en réponse à la raréfaction des prêtres (la problématique était énoncée dans ces termes et cette "raison" n’a pas beaucoup évolué…). Ils s’étaient fait éconduire proprement, racontait-il. La déception était d’autant plus grande que José s’imaginait encore pouvoir parler "d’égal à égal" avec Godfried qui avait été son condisciple au Collège Belge à Rome et qu’ils étaient tous les quatre un peu plus âgés que lui. Je pense que cet échec a marqué le début de quelques désillusions et pourrait expliquer qu’il ait écrit son "coup de gueule" dans HLM : "La tâche la plus urgente […] c’est de cesser d’ordonner des prêtres !"[2] Cette prise de position audacieuse ne lui a pas fait que des amis… Merci José d’avoir été un frère avec nous bien plus qu’un père pour nous, et un ami si agréable.


 

Pierre Collet (Hors-les-murs)

Notes :

[1]                José Lhoir a été curé-doyen de Nivelles de 1974 à 1989. Les autres étaient Jacques Dereau (doyen d’Ottignies †1997), René Cambier (doyen de Tubize †2015) et Éric Hage (doyen de Braine l’Alleud †2017).

[2]                Lire le texte complet sur www.paves-reseau.be/revue.php?id=1695 . On trouvera d’autres articles de José sur ce site en tapant son nom sur la fonction "outil de recherche".




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