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Il était une foi, une pierre d’Église !

Philippe Liesse
Publié dans Bulletin PAVÉS n°11 (6/2007)

Quel bonheur d’avoir connu Pierre de Locht ! Quel bonheur plus grand encore de le découvrir dans le cadeau qu’il nous offre à travers son dernier livre : «  Chrétiens aujourd’hui, un engagement contradictoire ? »

C’est un livre qui ne se résume pas, mais qui se goûte au fil des mots. Chacun pourra y découvrir l’une ou l’autre fleur qui servira de lumignon sur sa route. Pour ma part, j’ai façonné mon petit bouquet.

 « La vérité vous libérera » (Jn 8, 32) ! Chez Pierre, la liberté n’est pas un vain mot. Elle a été un combat de tous les instants, initié par le message des Béatitudes. Ce message était bien plus que le simple ‘billet à faire passer’, il a voulu l’incarner dans le concret de la vie. Dès lors, il n’a pu que rencontrer toutes ces femmes et ces hommes de bonne volonté, animés d’un même souci d’humanité, au-delà d’appartenance religieuse ou philosophique. Cette rencontre de l’autre, du mécréant, a toujours stimulé sa foi et a modelé sa liberté en véritable valeur ajoutée : « Au cœur de cet engagement en commun, il nous incombe, porteurs de la mémoire des grandes étapes du christianisme au cours de son histoire, de vivifier notre adhésion de foi et de rechercher sa juste place dans notre manière d’être au monde réel aujourd’hui. Il s’agit de se construire, d’acquérir une consistance personnelle, pour ne pas être sans cesse désaxé par les chocs de l’existence » (p. 45).

Convaincu de l’urgence d’intérioriser sa foi, il avait allégé sa besace des normes et des règles liées par définition à une époque et à une culture don-nées : «  Il s’agissait, non de répéter ce qu’avait vécu Jésus, mais d’incarner dans des situations diverses les orientations de vie initiées par le Christ » (p. 20). Ni ordres, ni obligations, ni sanctions, simplement la confiance et la liberté, en solidarité avec ceux que l’on rencontre sur le chemin, voilà les balises que sont ces grands appels évangéliques qui mènent à la suite de Jésus.

« Un chercheur de Dieu » ! Dans ses chemins d’humanité, Pierre s’est révélé être un infatigable chercheur de Dieu, un pèlerin de l’Éternel. Il était préoccupé de gérer la " soif d’infini" (p. 117) qui habite l’homme, tiraillé entre ce désir et l’incapacité de l’atteindre. Ce tiraillement, il l’appelle "tension vitale", mais il veut aussi en souligner les dangers. En effet, les religions cherchent à dépasser cette tension en dévoilant et en expliquant le mystère. Elles sont tentées de croire qu’elles peuvent atteindre le transcendant et qu’elles peuvent alors le déterminer. On en arrive au stade où c’est l’homme croyant qui manipule Dieu. Le danger s’accroît encore lorsque les religions, confortées par l’intime conviction de cette rencontre, se croient habilitées à déterminer la conduite du monde, sous forme de dogmes figés et professions d’infaillibilité.

« Jamais isolé, toujours en Église » ! Les autorités de l’Église ont tout fait pour l’isoler tant sa liberté de parole et d’action dérangeait. Privé d’espace clérical, il a tôt fait de trouver un trajet ecclésial dans le quotidien du peuple de Dieu. C’est l’Église de Lumen Gentium. Cette Église "Peuple de Dieu", le Concile en parle en mettant en avant l’égalité fondamentale de tous les baptisés. Cette égalité ne supprime pas la diversité des ministères, mais elle s’inscrit en faux contre toute tentative de les hiérarchiser (p. 29). Pierre était véritablement imprégné de ce sens d’Église, au point que sa grande sensibilité pastorale s’est épanouie dans les communautés de base. C’est là qu’il sentait la créativité de la vie, la dynamique de la foi, le véritable lieu de dialogue et de célébrations.

« Au chœur de l’humain » ! Dans la vérité et la profondeur de sa démarche, il a aussi découvert que les chrétiens n’ont pas le monopole des valeurs. Il s’est senti en harmonie avec tous ceux qui, sans référence à un au-delà, vivent les mêmes grandes valeurs humaines (p.74). Cette harmonie n’a jamais amputé sa foi au Jésus de l’Évangile comme il n’a jamais voulu amoindrir la dynamique humaine de ses amis athées sous prétexte qu’ils ne s’appuyaient pas sur une Transcendance. Tout est question d’écoute, de confiance réciproque, de volonté et d’engagement à former un chœur, au cœur de l’humain, car « seul l’humain est à notre portée » (p.91).

« Ut unum sint » ! Soyez un ! C’est à mon sens la fleur qui vient parfumer tout le bouquet. Non pas une unité clanique qui aide à resserrer les rangs pour mieux faire face à un ennemi potentiel, mais celle qui donne consistance à l’existence humaine. C’est l’humanité qui prend peu à peu son ampleur. « Jésus, le Christ, est au cœur de ce chemin d’unité. Soyez un ! Construisez patiemment la grande communauté humaine, je suis là, avec vous, partout où se forge la communion » (p. 49).

Lorsque Jésus dit à son Simon-Pierre : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église » (Mt. 16, 18), le disciple n’a voulu se réserver aucun statut particulier. Au contraire, il s’adresse à tous les chrétiens de son époque en leur rappelant qu’ils sont ces "pierres vivantes" (1 P 2, 5). Notre ami, Pierre de Locht, l’a intégré dans son vécu d’une manière claire et limpide. Oui, il est vraiment une pierre d’Église.

Philippe Liesse


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